Nikkei et SPX : scénario en WM ou "minimum"
A priori, comparer le Nikkei 225, l’indice Japonais, au S&P500 ne montre pas grand-chose d’intéressant.
Néanmoins, des analystes de Merrill Lynch ont ajouté quelques paramètres à cette comparaison : le Nikkei est exprimé en USD et le S&P500 traduit en Dollar Index, et le plus haut historique du S&P500 (septembre 2000) est superposé au sommet historique du Nikkei (décembre 1989), donc décalé de 9.75 ans.
Et ce graphique est troublant..
Les marchés seraient donc dans une phase ascendante jusqu’en décembre 2010, avant d’être frappés par une nouvelle vague de baisse, qui durerait jusque 2014 et nous mènerait plus bas que le creux de mars 2009, avant de remonter une nouvelle fois sans jamais parvenir à rejoindre les précédents plus hauts, puis de rechuter encore. Un W suivi d’un M ou un graphique à la « minimum »(essayez d’écrire ce mot à la main, vous constaterez la quantité de soubresauts..).
Si ce scénario se précise, il faut s’attendre à des entrées et sorties régulières en récession.
Nous sommes vraiment dans l’hiver de Kondratieff, et ce graphe nous donne une raison supplémentaire de rester très prudent et sélectif sur les marchés boursiers en 2010.
Once d'or divisée par SP500
Les graphiques ci-dessous - l'un à échelle classique, l'autre logarithmique - retracent le cours de l’once d’or divisé par le nombre de points de l’indice S&P 500.
L’or est un actif limité et que l’on ne peut pas reproduire à l’infini comme une monnaie courante, et c’est ce qui rend cette comparaison intéressante.
Non seulement ce tracé montre qu’à l’heure actuelle – l’once d’or vaut 0,95 du marché actions - et au vu des sommets atteints au cours des années 80 et de son inflation galopante, l’or n’est pas aussi surévalué que certains le prétendent.
L’on constate également que durant la période de gloire du marché des actions, les deux décennies qui viennent de s’écouler, le S&P500 a mis l’or au tapis, le maintenant pendant ces 20 ans sous la parité.
L’on peut en conclure, et ceci est à suivre régulièrement, que l’once d’or est très nettement sous-évaluée lorsque le cours du SP500 lui est deux fois supérieur, et que le rattrapage qui a lieu actuellement n’est qu’un "retour de bâton", une remise à niveau accélérée qui corrige un excès et qui pourrait mener l’or vers une valorisation de 2 fois l’indice S&P500.

Portefeuille de crise
Un lecteur – que j’apprécie beaucoup et qui me fait le plaisir d’être assidu - m’a demandé quelles étaient mes idées d’investissement dans le contexte actuel.
Je vais dans ce cadre repasser en revue les indices qui me semblent importants à signaler, et puis vous dévoiler mes achats récents.
Un peu d’histoire d’abord, pour l’anecdote : j’ai acheté mes premières actions en bourse de Bruxelles, 3 Solvac à 300 BEF (+- 7.50 eur) avec mes étrennes de l’année 1981. J’avais 12 ans. Je n’ai depuis jamais manqué d’intérêt pour la vie du marché boursier et ses opérations capitalistiques, et assisté aux trois grandes dernières crises – octobre 1987, 2001, et celle-ci – en y laissant naturellement quelques plumes.
Toujours investi beaucoup plus en actions qu’en immobilier. Quoique, en juin 2008, sentant le vent tourner avant la deuxième puis la troisième augmentation de capital de Fortis, j’ai vendu plus de 50% de mon portefeuille en arbitrant pour de l’immobilier locatif, et déséquilibrer mon petit patrimoine en le portant à du 20% actions – 80% immobilier (hors résidence principale). Il faut, pour les lecteurs étrangers, souligner le paradoxe belge où l’investissement immobilier – finalement le moins risqué – est fiscalement très encouragé, tant au niveau de l’emprunt hypothécaire déductible que des revenus locatifs, taxés forfaitairement sur une base très dévaluée.
Je ne suis pas un investisseur rempli de certitudes qui pense trouver la martingale dans ses placements, et ne suis toujours pas convaincu que se porter sur l’immobilier soit un bon choix dans la durée, eu égard à la profondeur de la crise actuelle, mais c’était probablement le meilleur choix de ce moment-là. Le rendement actuel du portefeuille de ces actions converties en immobilier, si je les avais conservées, serait négatif, affichant -17.6% contre leur prix de vente à l’heure actuelle.
Depuis lors, je suis toujours les marchés avec attention, mais suis encore plus prudent sur mes achats, que j’effectue en ne voulant surtout pas payer de surprix, après avoir évalué la valeur fondamentale de l’action. En effet, eu égard à certains indices que nous parcourons régulièrement sur ce blog, et au vu des derniers développements macro-économiques aux Etats-Unis et en Europe, il est fort probable qu’une rechute importante des marchés soit à craindre, au plus tôt dans la seconde partie de 2010, au plus tard en 2011.
Nous l’avons vu précédemment, la multitude d’aides d’Etat qui soutiennent artificiellement les marchés actions, les taux bas, qui devront tôt ou tard être relevés, et plus récemment le transfert du coût du sauvetage des banques sur les épaules des Etats -donc du contribuable qui souffrira de prélèvements fiscaux supplémentaires - induisant des déficits énormes, sont une menace importante pour la croissance et la reprise de la consommation.
Cette dernière étant d’ailleurs le seul objectif du monde politique, qui n’a pas encore réalisé que c’est leur course effrénée à l’incitation à la consommation - via l’accès au crédit pour tous, la carte de crédit que chacun est en droit de posséder, les politiques de taux zéro, etc - qui est à la base de la bulle du crédit actuelle, qu’ils empêchent par tous les moyens (incitants fiscaux, prêts à taux zéro, prime à la casse) de se dégonfler trop vite.
Je suis persuadé que nous sommes à un tournant, que la « satiété de consommation » prend sa place dans le monde actuel, et que nous passons progressivement d’une société de consommation à une société de préservation. Autrement dit, une terre inconnue pour nos dirigeants, qui doivent encore chercher leurs repères, aucune politique économique pour faire face à un changement de comportement n’ayant été mise en place par le passé.
Le Baltic Dry Index, indice très avancé de l’économie, ne montre toujours pas de signe de reprise continue. Comme en bourse, on a assisté à deux forts rebonds du transport maritime – probablement dû au restockage des entreprises – mais qui ne se transforment pas encore en reprise durable.
Sur le marché, le VIX, la volatilité représentant l’indice de frayeur des investisseurs, est revenu à des niveaux d’avant-crise, ce niveau bas étant à mes yeux un signal suffisant pour craindre une rechute des marchés, ou un mauvais timing pour y entrer sans être sélectif, dès lors que les solutions à l’éclatement de la bulle du crédit sont encore à l’état d’ébauches.
Le put/call ratio, qui met en balance le nombre d’acteurs haussiers (acheteurs de call) et le nombre de baissiers (acheteurs de puts) est à un niveau tel que l’optimisme quant à une hausse des marchés est béat. Rappelons que comme pour la prévision du rebond du USD, c’est lorsque la grande majorité pense dans un sens que le marché va dans l’autre direction.
Tandis que les marchés sont toujours soutenus par l’abondance de liquidités injectée par les banques centrales, ce quantitative easing qui tôt ou tard devra faire l’objet d’un retrait, et donc un assèchement des marchés.
Dans ce contexte, j’ai concentré mes achats récents sur trois axes, qui sont régulièrement traités sur ce blog :
- L’or. Je suis entré très tôt sur le GBS, Gold Bullion Securities, à 60 eur en octobre 2008, dès le début de la crise actuelle. En-dessous de 80 eur, il est probablement opportun de se renforcer. Si l’on préfère investir en USD, il vaut mieux favoriser le GLD, certificat coté à New-York qui est couvert par un nombre d’onces équivalent, placés dans un coffre tiers et qui peut donc être converti en or réel en tout temps et à première demande. Ceci est une mesure importante lorsque l’on achète des trackers sur l’or afin d’être certain que l’émetteur n’imprime pas plus de papier qu’il n’a de garanties réelles. Je ne crois pas aux investissements en sociétés aurifères, dont le comportement boursier est totalement décorrélé du cours de l’or et qui s’apparentent plus à un investissement à risque.
- L’inflation (via les matières premières). Je me suis positionné en octobre 2009 sur Euronav, un transporteur maritime dont le secteur sera le premier à bénéficier d’un retour à une conjoncture favorable, à 14.78 eur, et plus récemment sur Rosier, producteur d’engrais – cfr articles sur les terres agricoles - coté à Bruxelles, à 260 eur, et SMTPC à Paris à 27.5 eur, concession d’infrastructure qui devrait voir son cash-flow évoluer favorablement en cas de retour à l’inflation (revenus en hausse sur investissements amortis). Sans grande plus-value pour le moment, mais en anticipant une évolution positive pour les mois à venir.
- Les valeurs fortement décotées. Je cherche des valeurs dont les fonds propres sont supérieurs à la capitalisation boursière et dont les actifs circulants sont supérieurs aux dettes. En clair, des entreprises dont la cotation ne reflète pas du tout le haut du bilan ; des entreprises dont, en achetant les actions, on reçoit les actifs immobilisés – immeubles, machines, participations – à titre gratuit. Elles ne sont pas légion sur le marché, sont en général pas très liquides, mais j’ai acheté fin 2009 RHJ International à Bruxelles - une holding aux participations gratuites ! - dont l’actif net/ total des dettes équivaut à 5.50 eur/action, cours récent et dont le comportement actuel montre une volonté de hausse assez nette, golden cross graphique à la clé, Vet’Affaires et Exacompta à Paris, et Qiao Xing Universal (XING), société chinoise cotée au Nasdaq. Peu de sociétés connues – certains disent même que lorsqu’une société offre une décote sur fonds propres, c’est que l’équipe dirigeante doit être remplacée – mais probablement des sociétés solides.
Je ne possède aucune valeur dite « de bon père de famille » ou valeur-phare d’indices, car je suis convaincu que ces grandes valeurs ne surperforment jamais durablement le marché, et que les meilleures valeurs sont à trouver dans les « small caps ». Et je fuis les investissements en bons ou obligations d’état, sur lesquelles repose un risque systémique – cfr articles précédents sur ce blog.
Comme vous le savez, tous ces investissements sont risqués, doivent être pris en âme et conscience d’une perte totale, etc etc.
Pour conclure, je privilégierai lors de mes prochaines prises de position, des valeurs libellées en USD, car je ne suis pas persuadé que l’EUR puisse se renforcer dans la crise actuelle. En témoigne une menace toute récente de dégradation de la dette de certains pays européens - notamment la France et le Royaume-Uni, dont nous dénonçons régulièrement la dette et les déficits démesurés – qui pourrait être mise à exécution cet été, accentuant la pression sur l’Euro.
Dow Jones corrigé de l'inflation
L'on s'aperçoit que la purge devant nous ramener au support historique, eu égard à l'envergure de la crise actuelle, n'a pas encore eu lieu.
En second lieu, et pour compléter un article précédent, il nous montre l'importance du timing dans une décision d'investissement. La personne qui aurait misé une partie de son patrimoine en bourse en 1928 aura dû patienter plus de 35 ans pour récupérer sa mise de départ. Idem pour les parents baby-boomers : un placement pour leur enfant en 1963 est devenu rentable en 1995..

Dernière concentration de dettes avant l'implosion ?
Nous avons précédemment fait un rapide parallèle entre la crise actuelle des Etats européens, Grèce en tête, et les prémices de la crise bancaire en 2008.,
Reprenons le fil des événements : une alerte sur un établissement au mois de mars (Bear Stearns en 2008 = La Grèce en 2010 ?) sauvée de la débâcle par les deniers publics ; une faillite en septembre (Lehmann Brothers en 2008= défaut de la Grèce, Espagne ou du Royaume-Uni au second semestre 2010 ?).
La période s’étalant entre ces deux dates était en 2008 parsemée de recapitalisations d’établissements bancaires, « tant que les conditions de marché nous sont favorables » affirmaient les dirigeants de ces banques.
Eh bien, en ce moment et comme nous l’avons vu la semaine dernière ce sont les états qui se recapitalisent au plus vite, profitant d’une certaine absence de soupçons qui leur est pour l’instant encore bénéfique. Jusqu’au jour où plus personne ne voudra les suivre dans leurs multiples recapitalisations. Et les montants sont énormes, jugez-en par vous-mêmes :
La Grèce, avec une dette totale de 212 Mia EUR doit refinancer 50 Mia en 2010, soit 23.5% de sa dette ;
L’Italie doit lever 327 Mia cette seule année, soit 32% du total de sa dette ;
Les Pays-Bas renouvelleront 114 Mia cette année, soit près de la moitié de leur dette totale ;
Idem pour l’Espagne qui doit trouver 205 Mia sur le marché pour renouveler 47% de sa dette ;
La France doit lancer une souscription qui couvrira 41% de sa dette totale ;
etc.etc
Car le problème de la dette n’est pas seulement qu’elle devient très importante et ingérable, mais aussi et surtout que son coût de refinancement va maintenant contribue à asphyxier les états. Un seul milliard refinancé à du 5% au lieu de 3%, par exemple, augmente la charge de la dette d’un pays de 20 millions d’une année à l’autre, et donc à creuser les déficits. Le nœud du problème, c’est donc le coût de la dette.
L’on comprend donc l’empressement de ces états à rechercher des fonds sur les marchés avant que l’alarme ne soit donnée. Et étant entendu que la Grèce postpose ses différents emprunts depuis deux semaines, attendant d’avoir la certitude que le tour de table confirme une souscription à 100%, nous sommes en droit de croire que nous arrivons à la fin de cette période de grâce ;.
Alors, nous verrons probablement une seconde concentration – la première était celle du risque de faillite des banques qui fut transféré sur les épaules des états à cause de leur interventionnisme – avec cette fois un transfert de la dette des états faibles vers les états plus forts.
Et étant donné que la dette actuelle des pays faibles est déjà détenue à majorité par des mains étrangères plus puissantes, on comprend l’intérêt que les états prétendument solides ont à ne pas les voir défaillir.
Lorsque ce poids de la dette aura été concentré sur les épaules des états les plus résistants, et qu’eux-mêmes ne pourront plus fuir une nouvelle fois en avant en transférant ce poids sur d’autres épaules, se transformant eux-mêmes en pays à risque, nous verrons la construction européenne voler en éclats. Probablement d’ici un an ou deux, mais ceci se produira. Et nous serons heureux d’être resté investi en or plutôt qu’en actions et obligations.
Il nous faut surtout surveiller la durée de ces nouvelles émissions : s’ils arrivent à émettre des obligations à long terme, les états auront entre les mains une excellente raison de déprécier la monnaie, en mettant en place un programme d’inflation.
Par contre si la dette ne trouve preneur qu’à court terme, le jeu de l’inflation devra être postposé aux émissions longues suivantes.